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👁️ Constantin Brâncuși, sculpteur roumain amoureux de la matière

  • Arielle Laporte
  • 30 janv. 2021
  • 3 min de lecture

En 1876, Constantin Brâncuși naît à Hobița, un village rural au sud-ouest de la Roumanie, au milieu d’une famille paysanne et nombreuse. Il découvre alors déjà la sculpture sur bois, qu’il étudie d’abord à l’École des arts et métiers de Caïova – tout en apprenant la technique sculpturale sur d’autres matières – avant d’entrer dans celle des Beaux-arts de Bucarest en 1898. Après un passage à l’Académie de Munich, il se rend à Paris où il entre dans l’atelier du sculpteur Antonin Mercié puis dans celui d’Auguste Rodin. Il ne travaille que quelques semaines au service de Rodin, dont il ne partage pas la vision artistique : pour lui, la matière

« commande le thème et la forme qui doivent tous deux [en] sortir » tandis que le sculpteur français impose sa création à la matière. Il ouvre alors son atelier dans le 15ème arrondissement parisien, au sein duquel il fabrique son propre mobilier.


Cette rupture avec la vision rodinienne de la sculpture se manifeste en 1907 dans son œuvre en pierre intitulée Le Baiser, conservée aujourd’hui au Musée d’art de Caïova ; première d’une longue série de sculptures dont la Porte du baiser à Targû Jiu est considérée comme l’apogée (même s’il faut jouer à « où est le bisou ? »). Il s’agit d’un bloc de pierre, dont la forme donnée par deux figures en buste enlacées est adaptée à la forme initiale de la pierre. Cette disposition, accentuée par l’accolement des yeux et de la bouche du couple, donne à voir la fusion de deux êtres qui ne font désormais qu’un grâce à l’art, qui permet ainsi le rapprochement et le dépassement des difficultés. Brâncuși utilise même ce thème pour la tombe d’une jeune russe au cimetière Montparnasse à Paris, qui se serait suicidée par amour. Il s’agit de sa deuxième version du Baiser.


L’amour dans la mort

Le sculpteur réalise en 1909 une nouvelle œuvre sur le thème du Baiser, représentant deux figures entières enlacées, sur 90 centimètres de haut, en taille directe. Elle est la seule version de la série à dépeindre deux êtres en entier. Cette sculpture est destinée à orner la sépulture d’une russe issue de la haute société de Kiev, Tatiana Rachewskaïa. Peu d’informations sont accessibles sur cette jeune femme, à part qu’elle aurait fait un séjour en prison1 avant d’arriver à Paris. Elle aurait alors pris des cours de français avec un médecin d’origine roumaine nommé Solomon Marbais, avec qui une relation amoureuse aurait duré un temps. Elle se serait suicidée suite à cette rupture, à seulement 23 ans.

La configuration des deux amants fait écho à la philosophie de réconciliation de l’artiste, évoquée plus haut pour son premier Baiser et qui prend son sens quant à la destination de son œuvre. D’autant plus que l’artiste était perçu comme un « optimiste révolutionnaire »2, qui cherchait à unifier tous les peuples du monde en un seul. Une union idyllique évoquée dans Le Baiser ? Cette fusion de deux êtres peut également être une métaphore de la fusion de l’artiste lui-même avec la matière, ce qui s’oppose une nouvelle fois à la conception créatrice des sculpteurs classiques tel que Rodin.

Sur l’aspect purement visuel de l’œuvre, Brâncuși s’attache à un style primitiviste, qui semble répondre aux sculptures de Paul Gauguin tout en s’éloignant des tendances cubiste, dada et surréaliste, même s’il est ami avec Marcel Duchamp, Tristan Tzara ou encore Man Ray. Il garde une autonomie artistique et un esprit ancré dans les traditions anciennes, en s’intéressant aux arts africain et asiatique ainsi qu’aux œuvres archaïques ; influences que l’on peut retrouver dans les formes simplifiées des personnages enlacés. Cette simplification donne aux deux êtres une dimension universelle, tellement que la tombe d’où s’élève l’œuvre est devenue un lieu de rencontre pour les amoureux et aventuriers noctambules à la recherche de plaisir. Le cimetière n’est-il pas le lieu de tous vos fantasmes ?

1Selon l’écrivain et ami de la jeune Rachewskaïa, Ilya Ehrenbourg. Cité dans : Jérôme DUPUIS, « Brancusi : la suicidée, le baiser et les millions » (voir sources).

2Expression d’Alain Jouffroy, dans son article sur Encyclopædia Universalis (voir sources).


Sources :

« Constantin Brâncuși », dossier pédagogique, Centre Pompidou, 2006/2010. Lien : http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-brancusi/ENS-brancusi.htm

« La Roumanie, matrice de Brancusi », Invitation au voyage, ARTE, 2019. Lien : https://www.arte.tv/fr/videos/088519-000-A/la-roumanie-matrice-de-brancusi/

Alain JOUFFROY, « BRANCUSI CONSTANTIN (1876-1957) », Encyclopædia Universalis, consulté le 24/05/2020. Lien : https://www.universalis.fr/encyclopedie/constantin-brancusi/

Jérôme DUPUIS, « Brancusi : la suicidée, le baiser et les millions », 05/01/2019, L’Express, consulté le 24/05/2020. Lien : https://www.lexpress.fr/actualite/brancusi-la-suicidee-le-baiser-et-les-millions_2055484.html

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