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La Sagrada Familia, un « naturalisme sacré »

  • Arielle Laporte
  • 27 mars 2021
  • 4 min de lecture

En 1882, l’Association des dévots de St Joseph à Barcelone, mûrit le projet d’une église qu’elle confie à l’architecte espagnol Francisco de Paula del Villar. Plus précisément, il s’agit d’édifier un « temple expiatoire », que Villar habille d’un style néogothique – des arcs brisés aux vitraux, jusqu’aux arcs boutants qui soutiendront l’édifice. Cependant, son projet n’aboutit pas, et c’est un architecte à la notoriété grandissante qui prend le relais, à 31 ans, pour construire ce qui deviendra l’un des monuments modernistes européens les plus visités aujourd’hui ; Antoni Gaudí (1852-1926) donne vie à la Sagrada Familia.

Né en Catalogne dans une famille de chaudronniers, Gaudí manie jeune les volumes, les espaces et les matériaux, et passe beaucoup de temps à observer la nature – qui va devenir sa principale source d’inspiration artistique. Il part suivre des études d’architecture à Barcelone de 1870 à 1878, année durant laquelle il rencontre l’industriel et amateur d’art Eusebi Güell, qui devint son mécène. Quatre ans plus tard, il succède à Villar pour la construction de la Sagrada Familia, projet auquel il travaille jusqu’à être renversé mortellement par un tramway à Barcelone, en 1926. Il est tentant ainsi de parler de cet édifice comme l’« œuvre de sa vie ».


Un projet d’envergure


Lorsque Gaudí reprend les plans de la Sagrada, il opte pour une nouvelle esthétique : celle du modernisme catalan, tendance espagnole de l’Art nouveau s’inspirant des mouvements artistiques européens contemporains tels que le symbolisme et l’impressionnisme. Il cherchait à moderniser la société notamment, en Catalogne, par une réappropriation de la culture catalane – à une période de montée du nationalisme dans la région. A travers cette œuvre il s’agit de célébrer la foi catholique (encore partagée par une majorité de catalans) et la « Sainte Famille ».

Le plan du « temple » en croix latine de Gaudí, sur ses quelques quatre-vingt-quinze mètres de long, se compose d’une nef divisée en cinq vaisseaux, menant à un large transept et une abside à sept chapelles rayonnantes. Si la verticalité est omniprésente dans l’œuvre, assimilable à une foi élevant l’Homme vers Dieu, les façades s’appliquent à retracer la vie de son fils en suivant les mouvements du soleil : de la façade du levant, correspondant à la Nativité de Jésus (sur le bras nord du transept), puis celle du midi pour la Gloire (au sud de l’édifice) et enfin, celle du couchant, correspondant à la Passion et la mort du Christ (bras sud du transept). Les multiples colonnes supportant l’édifice sont également consacrées à plusieurs figures associées au christianisme, notamment aux quatre évangélistes (dont les symboles sont visibles à la croisée du transept) ; aux douze apôtres entourant Jésus ; ou encore aux saints Pierre et Paul, liés aux deux colonnes soutenant l’arc triomphal, qui mène au chœur. L’édifice s’attache aussi à donner un caractère universel à l’Église, en consacrant des colonnes aux évêchés de Catalogne et d’Espagne, sans oublier ceux du reste du monde.

La nature comme acte divin

© Photographies personnelles, septembre 2019.


Comme écrit plus haut, la Sagrada Familia est une œuvre du modernisme catalan, qui s’exprime par une foison d’ornements, des formes exubérantes et un goût prononcé pour les motifs végétaux. Non seulement l’architecture est truffée de références bibliques, mais elle incarne aussi un hommage à la nature comme création divine.

Gaudí cherchait en effet à imiter la création du monde, afin de poursuivre ce qu’a entrepris Dieu. Il suit simplement sa volonté, et inscrit ainsi son architecture dans un art sacré. Les motifs naturels incarnent donc, dans l’architecture de la Sagrada, la trace de Dieu sur Terre, tout en mettant en valeur une dimension symbolique : réunir en une œuvre les mondes terrestre et céleste. Cette réunion passe par l’aspect même de l’édifice, qui rappelle une montagne, avec comme cimes les tours à pinacles – joliment sculptées de fruits, de colombes, de feuilles –, reliant ainsi ces deux mondes. Un autre lieu naturel se devine à l’intérieur de l’édifice : la structure arborescente de la nef, rappelant une forêt, et ses jeux végétaux sur les piliers. L’architecte voulait en effet représenter des palmiers sur ceux de la nef centrale (symbole de la gloire et du martyr) tandis que les piliers des vaisseaux latéraux s’incarnent en lauriers (également une image de gloire, mais aussi d’intelligence).

Le « temple expiatoire » d’Antoni Gaudí est ainsi l’incarnation d’un art sacré, mystifiant la Bible et la Nature par une architecture décorative et symbolique. L’architecte ne put voir que le clocher Saint Bernabé en élévation de son vivant, avant que d’autres ne poursuivent son projet. Malgré les actes de vandalisme, la destruction de documents liés à la construction durant la Seconde Guerre Mondiale, et un financement difficile (basé sur des dons) ralentissant la construction, sa reconnaissance est actée en 2005 : la crypte et la façade de la Nativité furent inscrites au patrimoine mondial de l’humanité de l’UNESCO. L’édifice gaudien devrait se terminer en 2026 et la mise en place des décors en 2032, pour le plus grand plaisir de nos sens.



Sources :

Albert FARGAS, Symbologie du temple de la Sagrada Familia, Saint Lluis, Editions Triangle Postals, 2009. (d'où est tirée l'expression « naturalisme sacré »)

"Biographie d’Antoni Gaudi », Casa Battló, consulté en janvier 2021. Lien : https://www.casabatllo.es/fr/antoni-gaudi/

« HISTORIA DE LA BASÍLICA », Sagrada Familia, consulté en janvier 2021. Lien : https://sagradafamilia.org/es/historia-del-templo

Philippe PORRET, « Antoni Gaudí, architecte arborescent… de La Secreta Familia ? », Sigila, 2011/2 (N° 28), p. 65 à 78, consulté en février 2021. Lien : Antoni Gaudí, architecte arborescent… de La Secreta Familia ? | Cairn.info

« Sagrada Familia », WikiArquitectura, consulté en février 2021. Lien : https://en.wikiarquitectura.com/building/sagrada-familia/

« Temple Expiatori de la Sagrada Família », Portal Gaudí, consulté en janvier 2021. Lien : http://www.portalgaudi.cat/fr/immeubles/temple-expiatori-de-la-sagrada-familia/

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